Arielle Heaven

Arielle Heaven

Quand j’étais enfant, j’étais brillante en classe. Première de classe. Jusqu’en classe de 5e. Ce n’est pas bien fameux, je le sais. Ma fulgurante ascension parmi les meilleurs n’a que très peu duré. La raison ? En classe de 5e,j’ai connu mes premières palpitations cardiaques. Le coupable? Un jeune garçon au teint clair qui venait me rendre visite à la fin du cours les soirs pour me raccompagner chez moi. Et quand il venait, ce n’était point les mains vides. Il venait avec une large enveloppe qui contenait le récit de toutes les émotions que je suscitais en lui. Je lui remettais la mienne en retour et à peine arrivée à la maison, je me précipitais sur la lettre comme une assoiffée sur un verre d’eau. Et comme ma soif était generalement grande, je gardais la précieuse lettre entre mon cahier de leçon. Un coup d’œil à la lettre après chaque page de leçon apprise.

 A la fin, j’apprenais plus la lettre par cœur que la leçon. Résultat, le jour suivant, j’avais une note de plus en plus basse. Désormais et pendant des années, je naviguai dans les eaux troubles de la médiocrité et ma seule bouée de sauvetage fut tout ce qui ressemblait de près ou de loin aux lettres de mon amoureux. C’est ainsi que je me passionnai pour Molière, les Harlequins et la littérature. Mon pauvre père n’y comprenait pas grande chose, et mon bulletin fut bientôt si insipide qu’il arrêta de me demander si je serai la prochaine première de classe. Je ne le fus plus.

Désormais et pendant des années, je naviguai dans les eaux troubles de la médiocrité et ma seule bouée de sauvetage fut tout ce qui ressemblait de près ou de loin aux lettres de mon amoureux

 Jusqu’en Terminale,où après avoir redoublé la D, je partis en A. Mais cela ne compta pas vraiment. Ma moyenne n’était pas fameuse et je n’étais qu’une « redoublante ». Lorsque je revenais du Ghana chaque congé et cela jusqu’après ma Licence, mon père ne comprenait pas grande chose à mes notes. Elles etaient desormais « A », « B », « C » ou « D ». Meme quand j’avais un A, il ne pouvait savoir si j’etais la meilleure,puisque d’autres étudiants aussi avaient des A.Puis, je décidai de commencer les cours de Master alors que je travaillais en journée. Comme la plupart de mes décisions en ce moment-là se prenaient sur un coup de tête, mon père me demanda si réellement j’étais consciente de l’enjeu qui m’attendait. Je dis oui, ce qui n’était pas vrai. Pour preuve,les mercredis il y avait un programme à l’église auquel je voulais absolument prendre part. Donc les cours du Mercredis soirs pour moi, il n’en était pas question.

 Jusqu’au jour où je vins au cours un Jeudi voir mes camarades en train de composer. Ils en avaient été informés la veille, tous sauf moi puisque j’étais à l’église. J’eus 7. Droit de Publicité. Master 1. Le soir-là quand je rentrai, toute silencieuse, je m’agenouillai pour prier. » Comment le Dieu que j’ai servi la veille pouvait me laisser tomber le lendemain ? Un minable 7 ? Quel intérêt y avait-il à être chrétien pour finir parmi les derniers ? La Bible n’avait- elle pas dit que je serai la tête et non la queue ? » A ce moment de mes réflexions, j’entendis Dieu me dire « Il y a un temps pour tout ». Certes je voulais le servir, j’en avais la volonté, mais Il venait de me faire comprendre qu’Il est un Dieu d’ordre et de discipline, et que le temps des études doit être dédié aux études. Il me fit comprendre qu’être disciplinée au cours,y aller les Mercredis aussi, c’était une façon de le servir, puisque ce faisant, j’augmentais mes chances d’être la meilleure, d’être la tête et non la queue, et ainsi de glorifier Son nom à l’annonce des résultats. Tous sauraient ainsi que je suis réellement créée à l’image de Dieu : inégalable, brillante, unique.

Comment le Dieu que j’ai servi la veille pouvait me laisser tomber le lendemain ? Un minable 7 ? Quel intérêt y avait-il à être chrétien pour finir parmi les derniers ?

 Dès ce soir-là, mon attitude fut conquise par des pensées de victoires. Je n’avais qu’un seul objectif. Être la meilleure, comme Dieu. Mes camarades ne me comprenaient plus, les profs me trouvaient bizarre. J’étais la seule qui demandait à chaque professeur le programme de ses cours, dès sa première séance. J’anticipais sur tout. Je posais des questions pour avoir fait des recherches avant de venir en classe. Puis vint la fin de l’année, je partis en vacances puis revins à la rentrée suivante. Affichage des résultats. J’étais la 1ere de ma classe et la 2e des Master 1. Lorsque de l’école, j’appelais mon père pour le lui annoncer, il cria au téléphone « Arielle ?? C’est bien toi Arielle AKOUETE ?? Tu étais aussi forte ? ». Moi « Non Papa, c’est mon Dieu qui est fort. ».Lorsqu’en fin de Master 2, je me tins sur l’estrade du Palais des Congrès pour recevoir le prix de la 1ere des Master 2 des HECM de tout le Bénin, je levai la tête pour regarder mon père au loin. Des mètres nous séparaient. Mais je pouvais lire sur son regard du respect, de l’admiration. Au moment où je m’y attendais le moins, il se leva sur ses pieds et se mit à m’applaudir. La salle se joignit à lui. J’eus pour la première et non la dernière fois de ma vie un Standing Ovation. Dieu peut changer votre histoire. Il peut vous amener de la queue jusqu’à la tête…

 Arielle Heaven